VIVRE AVEC LA LOI TAUBIRA
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- Publication : mercredi 29 mai 2013 15:28
En dépit d'une mobilisation impressionnante, la majorité au pouvoir a mené à son terme, avec la promulgation de la loi Taubira, l'ouverture du mariage et de l'adoption aux personnes de même sexe.
Il a dû pour cela user et abuser des procédures parlementaires et recourir aux intimidations ou violences policières.
On peut se demander pourquoi un tel acharnement de la part de M. Hollande à ne "rien lâcher", et même à revenir sur la promesse qu'il avait faite aux élus locaux d'accorder le bénéfice de la clause de conscience à ceux d'entre eux qui ne voudraient pas procéder à des mariages entre personnes de même sexe.
Remarquons tout d'abord que son image dans l'opinion était déjà suffisamment dégradée pour qu'il n'ait pas à craindre une baisse de sa cote de popularité; cette dernière a d'ailleurs légèrement remonté après la promulgation d'une loi qui ne pouvait que satisfaire les ennemis les plus résolus de la famille.
Cependant ce passage en force, contre la volonté de la partie la plus soucieuse du bien commun de la population et dans l'indifférence d'une autre partie, également conséquente, n'avait en apparence pour objet que de donner satisfaction à une faible part de la minorité homosexuelle qui ne représente elle-même qu'une petite partie de la population.
La minorité d'une minorité
Cette minorité de minorité des candidats au mariage est constituée par ceux qui souhaitent unir leur nom sur un même parchemin pour affirmer leur identité sexuelle, ceux qui veulent donner un parent 2 à leurs enfants et ceux qui cherchent une fiscalité avantageuse pour transmettre leur patrimoine.
Leur nombre pourra être relativement important pendant un an ou deux, le temps que ceux qui préfèreront le mariage aient transformé leur Pacs. Une fois cet effet de rattrapage épuisé, le total des mariages et des Pacs entre personnes de même sexe sera naturellement supérieur à celui des seuls Pacs enregistrés à ce jour, puisqu'un choix sera offert à ceux qui souhaitent officialiser leur union.
S'agissant de la transmission du patrimoine, son effet devrait être peu important, cette revendication étant restée discrète. S'agissant des autres revendications, on peut considérer en première approximation que le fait de pouvoir choisir entre deux solutions entrainera une hausse comparable à celle provoquée par l'ouverture du même choix aux couples hétérosexuels avec la création du pacs.
Le nombre cumulé des mariages et des Pacs est passé de 312 000 en 2001, un an après la création du Pacs, à 448 000 en 2011. En appliquant la même progression de 44 % aux 7 000 Pacs de 2011 on porterait leur nombre à 10 000, soit à peine plus de 2 % de l'ensemble.
Pourquoi tant d'acharnement ?
Le Président de la République avait pourtant deux raisons décisives de risquer son avenir politique pour une si réduite minorité :
L'une est qu'il doit son succès, en dépit des efforts de son adversaire pour se les concilier, au soutien des médias, ou plus exactement à celui des puissances financières dont dépendent ces médias - les multinationales, particulièrement celles vendant des produits ou des services nouveaux, voyant à juste titre dans les familles, surtout si elles sont nombreuses, un frein à la consommation de leurs produits.
L'autre est que la famille est idéologiquement le seul véritable obstacle au meilleur des mondes dont il rêve. C'est pour la même raison, mais avec une volonté opposée, que tant de familles se sont levées contre son projet, sans illusion sur les promesses des politiques qui les ont soutenues tout en spéculant sur les retombées électorales qu'ils pouvaient attendre de leur soutien.
C'est de ces familles que pourra naître le redressement nécessaire de notre société car, comme l'écrivait Funck-Brentano dans son histoire du Moyen âge, à propos de ce qu'il appelait La nuit du IXe siècle : « Au milieu de la tourmente la famille résiste, se fortifie.»
Philippe Gorre