La Sainte-Baume
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- Publication : mercredi 11 septembre 2013 14:34
Deux jours au pied de la grotte de sainte Marie-Madeleine, dans l’Hostellerie de la Sainte-Baume, tenue par les Dominicains qui veillent sur le sanctuaire et accueillaient la troisième édition des universités d’été crées à l’initiative de Mgr Rey, l’Evêque de Toulon-Fréjus et portées par l’Observatoire Sociopolitique de ce diocèse. Le thème en était certes le changement, mais à travers lui, en fait, la résistance. La participation de la Présidente de la Manif Pour Tous, Ludovine de la Rochère, soulignait combien le grand mouvement contre le mariage unisexe et la mobilisation qu’il avait entraînée étaient les ferments de la réflexion des participants, des Chrétiens fervents et engagés réunis dans un « lieu où souffle l’esprit ». Résister à la dérive de notre société, à la montée de l’individualisme narcissique, du consumérisme matérialiste et du relativisme paresseux, tel était l’état d’esprit des Catholiques réunis à la Sainte-Baume, mais c’était moins résister au changement, que changer de résistance, en la rendant à la fois plus dynamique, plus réfléchie et plus créatrice. Par ses méthodes d’action, par son inventivité conceptuelle et tactique, la Manif Pour Tous, a surpris et a atteint ses objectifs, sauf le dernier, le retrait de la Loi Taubira. C’est la raison pour laquelle sa Présidente, après avoir retracé l’historique du mouvement a clairement indiqué que le combat continuait, de manière plus générale contre toutes les actions menées par le pouvoir et les groupes de pression porteurs de la culture de mort, et de la marchandisation du corps humain. Elle a également précisé l’état des relations entre la Manif Pour Tous et Frigide Barjot qui a fait d’ailleurs un passage au repas du vendredi soir, sans susciter beaucoup d’intérêt. Elle n’a pas été « virée » comme elle cherche à le faire croire, mais est partie, croyant entraîner le gros des troupes, alors que celles-ci ne la suivaient absolument pas sur le projet d’union civile. Que les homosexuels hostiles au mariage aient participé aux manifestations était excellent, mais pour la plupart des opposants, l’homosexualité n’est qu’un aspect de la vie intime. Elle n’a pas à être institutionnalisée ni reconnue par la société puisqu’elle ne répond pas à la vocation anthropologique du couple qui est, bien évidemment, de prolonger l’espèce humaine à travers une filiation claire d’abord et une éducation équilibrée ensuite. J’ai d’ailleurs interpellé Mme de la Rochère sur l’emploi malheureux du mot « homophobie ». Ce terme orwellien qui désigne un « crime-pensée » propice aux amalgames n’est qu’une machine à tuer la liberté de penser. Lorsqu’on parle la langue totalitaire des adversaires, on finit par penser comme eux.
J’ai eu également l’occasion, dans le cadre d’un forum, d’intervenir sur le changement des mentalités, en pointant le rôle des médias dans la genèse de celle qui est dominante, cette pensée inconsciente d’elle-même, souvent incapable de se justifier lorsqu’elle affiche ses préférences pour une personne ou pour une idée. L’idéologie ravageuse que promeut le gouvernement actuel tend à réaliser la contre-utopie décrite par Tocqueville avec sa foule d’individus hédonistes et son Etat-Providence, ce mauvais père qui veut maintenir ses enfants dans l’enfance. Il faut au contraire que les citoyens soient des « personnes », dont la liberté signifie « responsabilité », dont l’identité se déploie dans le temps long et la solidarité avec les autres. Internet peut être le moyen de contrebalancer les grands médias et d’empêcher la contamination de la mentalité d’un vieux et grand peuple par une idéologie réductrice. Mais, il y a aussi le rôle déterminant de l’Ecole dans la formation des esprits. Anne Coffinier a donné une conférence sur l’Enseignement Libre hors contrat. La liberté de l’Education, la priorité des parents comme éducateurs sont aux antipodes de la pensée de Vincent Peillon qui veut que l’école arrache l’enfant au déterminisme familial. Malheureusement, selon Mme Coffinier, l’école sous contrat ressemble de plus en plus à l’école publique. Il est donc nécessaire de développer des écoles vraiment libres et sans dépendance de l’Etat. J’ai pris ensuite la parole pour saluer l’intérêt de cette démarche, mais aussi pour demander aux parents de retrouver l’esprit combatif de 1984 contre la Loi Savary. Aujourd’hui, l’enseignement privé sous contrat, à 90% catholique est étouffé, matériellement par l’insuffisance des moyens publics consentis à ce qui est reconnu comme un service public et par la limitation scandaleuse, arbitraire et anticonstitutionnelle, de ses effectifs à 20% des élèves. Il l’est aussi idéologiquement par Peillon quand il prétend l’empêcher de défendre les valeurs qui justifient son existence même. Lorsque le Ministre ose interdire qu’un débat ait lieu sur le mariage et donc sur l’absurde loi Taubira dans les écoles catholiques, il porte atteinte au caractère propre inscrit dans la Loi Debré. Lorsque l’Etat limite le choix des parents, il méconnaît la notion de besoin scolaire reconnu fondé sur le droit des parents à choisir l’école de leurs enfants. Il faut donc aussi réinvestir l’enseignement sous contrat et défendre vigoureusement ses droits. Bâtir une utopie séduisante dans une île ne doit pas interdire de reconquérir le continent.
Christian Vanneste