chers Amis
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- Publication : mercredi 19 février 2020 14:47
Notre société, avec la nouvelle loi de bioéthique, est en train de franchir un pas supplémentaire dans l’abîme de sa déshumanisation. Priver délibérément les enfants de père, livrer les petits d’homme, à travers l’embryon, aux convoitises des marchés financiers, instaurer le tri entre les embryons « dignes » ou « indignes » de vivre, effacer jusqu’aux noms de père et mère, c’est un crime que la société tout entière paiera très cher. Par nos démarches auprès des députés et sénateurs ainsi que par la large diffusion des articles de Michel Pinton et du Pr. Yvonne Flour (LETTRES 98 et 99), nous avons apporté notre contribution modeste mais utile pour mettre en relief les enjeux de cette loi et éclairer les consciences.
Le rêve d’Icare
Rappelons-nous l’avertissement des Grecs : Icare, gonflé par l’ivresse de la démesure, l’ubris, et croyant pouvoir s’affranchir des contraintes de la nature, s’écrase lamentablement et s’anéantit lui-même alors même qu’il prétendait tutoyer le soleil…
Et pourtant, nous dira-t-on, les connaissances scientifiques, les techniques médicales, les formes du mariage et de la famille, plus généralement la société, évoluant, il est normal que les lois changent aussi.
Vrai et faux à la fois. Vrai car la société et ses lois ont toujours à se perfectionner. L’organisation familiale, les us et coutumes régissant le couple et le mariage, n’ont en effet cessé d’évoluer au cours des âges et nous n’avons pas la prétention d’avoir atteint une perfection à laquelle on ne saurait toucher.
Faux car ces évolutions se sont toujours faites dans un souci de protection croissante des plus faibles. Et c’est cela qui fait une civilisation. Chaque dérogation à cette règle s’est accompagnée d’une régression de la condition humaine.
Les hommes préhistoriques mus par la seule force de leurs instincts, et laissant les mères se débrouiller toutes seules, ont peu à peu pris conscience de leur paternité. Ce fut progressivement l’invention du couple et de la famille, avec la répartition des tâches entre celui qui assure protection et subsistance et celle qui donne la vie et prend soin des enfants. Comme l’explique le pédiatre Aldo Naouri[1], les mères et leur progéniture y ont gagné à tous points de vue, y compris en confort et en sécurité. Et l'espèce tout entière a trouvé dans ce dispositif simple les moyens d’aménager progressivement les liens mutuels, de construire des sociétés et des civilisations, en tous cas, celles qui ont perduré dans l’Histoire.
Depuis ces temps préhistoriques, nous avons fait du chemin !
L’Ancien Testament est peuplé de familles polygames (« à cause de la dureté de leur cœur » comme disait Moïse). La monogamie, améliorant la condition de la femme, est apparue avec les sociétés antiques égyptiennes, grecques et romaines. Les hommes pouvaient avoir des relations sexuelles avec des prostituées, ou avec des esclaves mais le mariage conditionnait la transmission des biens, et protégeait le droit des enfants légitimes. Les divorces étaient monnaie courante.
Pauvres enfants de l’Antiquité, où l’infanticide était fréquent, aussi bien à Rome qu’en Grèce et dans l’ensemble du bassin méditerranéen. Le père ou l’Etat avait droit de vie ou de mort et l’ « exposition » des enfants, à Sparte par exemple, ou la boulimie du dieu Moloch n’avaient nulle pitié d’eux.
Si l’on peut voir dans l’Evangile l’institution du mariage non seulement monogame mais indissoluble, il a fallu encore de nombreux siècles pour en définir les contours. Le christianisme n’a cessé depuis d’améliorer le sort de la femme et de l’enfant notamment en s’opposant à la répudiation ou en limitant le pouvoir abusif des parents. L’Eglise, dans l’optique de protéger le plus faible, entend s’assurer du consentement de la femme. Mais ceci ne s’obtient pas du jour au lendemain.
Un second « péché originel »
Aujourd’hui, la rupture se présente non pas comme un progrès mais comme un retour en arrière saisissant. Plutôt qu’améliorer la condition humaine grâce aux nouvelles découvertes, le législateur préfère recréer un Homme rêvé, hors sol, tout droit sorti de sa volonté démiurgique. Jusqu’à présent, la civilisation avait consisté à assurer une protection croissante des plus faibles ; aujourd’hui, l’homme démiurge entend les supprimer.
Sans aucune prétention théologique je reprendrai la terminologie chrétienne pour qualifier ce à quoi nous assistons de second péché originel: au premier péché, l’homme et la femme prétendirent, sous l’influence du serpent, devenir l’égal de Dieu.
Aujourd’hui, cette artificialisation contre nature de la procréation et cette volonté de séparation sexualité/procréation est un second péché « originel » parce qu’il touche à l’origine de l’homme. Celui-ci refuse de n’être pas son propre créateur. Il ne cherche plus à être l’égal de Dieu, en toute et naïve amitié, il veut prendre Sa place après l’avoir chassé et tué.
Après le péché originel (le premier péché), être l’égal de Dieu, nous sommes en présence d’un deuxième péché originel (qui s’attache aux origines), prendre la place de Dieu. Evidemment, ceci n’a rien de très théologique mais on ne peut s’empêcher de frémir en pensant aux conséquences terribles de ce deuxième péché contre les origines quand on sait ce qu’elles ont été pour le premier, à l’origine…
Le rêve des retraites…sans réflexion démographique
La réforme du système de retraites par répartition a occupé le devant de la scène ces derniers mois et l’occupera longtemps encore. Famille et Liberté ne pouvait l’ignorer parce qu’elle a des incidences importantes sur l’avenir des familles mais aussi parce que le principe de la répartition est celui de la solidarité entre les générations. Les actifs d’aujourd’hui finançent les retraites d’aujourd’hui…tout en escomptant que les actifs de demain financeront les leurs. Or on oublie de rappeler que « les actifs de demain » sur lesquels ils comptent, ce sont les enfants aujourd’hui. Le projet soumis par le gouvernement fait totalement l’impasse sur cette question centrale et condamne ainsi d’avance son projet. Un peuple qui supprime ses enfants finit par en payer le prix.
Cette réforme telle qu’elle nous est présentée nous parait mal engagée …Le Conseil d’Etat a d’ailleurs rendu un avis très sévère sur le projet de loi pointant en particulier des projections financières « lacunaires »... Nous croyons pouvoir dire que cette réforme est totalement étatiste (or, l’Etat a souvent prouvé qu’ il ne sait pas gérer), confiscatoire (l’Etat s’approprie les provisions des régimes autonomes -et non pas spéciaux, ce ne sont pas les mêmes – qui géraient bien et avec une vision à long terme, et il envisage une nouvelle taxe[3]), non financée (en l’état actuel des choses, autrement que par un nouvel impôt et par la confiscation évoquée ci-dessus et qui ne bouchera le trou qu’un temps), reposant sur des calculs erronés[4]. Contrairement à ce qui est proclamé, elle n’apporte rien aux familles déjà lésées. En fin de compte, elle se heurtera à la pyramide des âges dont elle est totalement tributaire.
Les choses peuvent encore changer…
Une juste anthropologie pour « sauver la planète »
Pendant que la société se déshumanise en jouant les apprentis sorciers avec sa nature, on détourne notre attention sur la conservation de la planète. Non sans raison car personne ne contestera que l’homme se comporte bien souvent en mauvais gestionnaire, voire en destructeur d’un environnement –animé ou inanimé- dont nous sommes par ailleurs tributaires.
Un courant de pensée maintenant dominant condamne, au nom de la Terre divinisée jusqu’au sein même de l’Eglise en Gaïa, une vision trop « anthropocentrée » de l’homme[1]. On peut se demander si au contraire le vrai remède ne résiderait pas dans une juste anthropologie. On voudrait que nous observions scrupuleusement les lois de la création comme si l’homme n’en faisait pas partie et pouvait s’en affranchir pour lui. Alors que c’est la connaissance que nous avons de nous-même et de notre juste place dans l’ensemble de la création qui peutnous faire prendre conscience de notre responsabilité sur le monde qui nous entoure. L’anthropocentrisme n’est pas l’égocentrisme auquel nous condamne l’individualisme de l’homme qui ne sait plus qui il est. Ce qui peut sauver la planète, c’est un supplément d’humanité. Nous aborderons cette question, notamment dans le Libre Journal de la Transmission de Radio-Courtoisie[2] dirigé par Valérie d’Aubigny, le 9 mars de 12h à 13h30.
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Des voix venant de toutes les familles politiques ou idéologiques (cf. la tribune dans le Monde de Jacques Testard, José Bové, Sylviane Agacinsky) se font à présent entendre pour s’opposer aux projets mortifères qui nous menacent. Aidez-nous à poursuivre ce combat essentiel.
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Claire de Gatellier
[1] Cf. la plaquette du Collège des Bernardins Entendre le Cri de la Terre p.18 Hiver 2020
[1] Lire l’excellent livre d’Aldo Naouri La vie à pleines mains Ed. Odile Jacob, 2014