Les enfants du divorce : un tabou
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- Publication : lundi 7 septembre 2015 12:01
Les enfants du divorce : un tabou ? Il semble à la fois très banal et bien audacieux de risquer une analyse des conséquences du divorce sur les enfants. Très banal parce que l’on a suffisamment de recul maintenant pour en admettre généralement les effets désastreux, mais bien audacieux car si la chose est admise « en général » et de loin, elle concerne maintenant tant de gens de plus ou moins près que la délicatesse semble commander d’éviter le sujet. Un divorce est presque toujours un traumatisme, une blessure, qui frappe tant de gens dans leur histoire la plus intime, qu’il est très difficile d’en parler sans risquer de blesser.
En outre, parler des implications sur les enfants revient à parler de la chose elle-même : du divorce. Or, celui-ci est devenu comme l’équivalent d’un acquis social que personne ne s’aventurerait à mettre en cause par quelque détour que ce soit.
En parallèle, il y a la thématique des droits de l’enfant qui est récurrente dans le droit international comme dans le nôtre. Nous fêtons cette année le 25ème anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant... Or il est tout à fait impossible de parler du droit des enfants en s’interdisant de s’interroger sur l’un de leurs besoins les plus fondamentaux : grandir entre leurs deux parents.
C’est pourquoi, à l’occasion de son vingtième anniversaire, Famille et Liberté a bien volontiers répondu à la proposition de l’International Children’s rights Institute, fondation pour les Droits de l’Enfant créée par le professeur Roberto Lopez, Northridge University, d’organiser sur ce thème, un colloque réunissant chercheurs et cliniciens venus des USA, du Royaume-Uni et de France. Ce sera une façon, pour Famille et Liberté, de célébrer son vingtième anniversaire.
Comprendre pour construire
Nous essaierons donc de comprendre ce que vivent les enfants sans pour autant nous autoriser à porter quelque jugement que ce soit sur l’histoire des parents. Equilibre difficile car nous nous trouvons en fait devant le dilemme entre le droit de l’enfant et celui des parents. Au siècle dernier, on enseignait encore qu’en cas de conflit de droits, on privilégiait le plus faible, c’est-à-dire, l’enfant. Irions-nous vers un droit du plus fort ? De celui qui a la parole, voire l’autorité ?
Nous voulons au moins donner la parole aux enfants, dans leur double dimension d’enfants mais aussi de futurs adultes, de ceux qui formeront la société de demain, société dont la qualité dépendra de la qualité de leur enfance. Une société qui paie le prix fort pour cette enfance déchirée.
Il faudra aussi s’interroger sur l’évolution à venir des structures familiales et les conséquences à prévoir sur les enfants dans un contexte d’individualisme et d’hédonisme. Que deviendront les enfants lorsque les familles recomposées ou monoparentales seront à leur tour ringardisées par de nouveaux genres plus libres encore et contenus en germe dans le libéralisme sexuel, la référence individuelle absolue et l’indifférenciation des genres. Les trouples, quadrouples, communautés indifférenciées et sans engagement de femmes, d’hommes et d’enfants sans appartenance et sans liens réels autres que ceux de l’instant et que l’on désigne du nom chantant de polyamour sauront-ils garantir à l’enfant la sécurité et la stabilité nécessaires à son épanouissement ?
Une réflexion s’impose, qui concilie la difficile recherche du bonheur de l’adulte – qui est, il faut le reconnaître aussi, une des conditions de l’épanouissement de l’enfant – et la protection de l’enfant que la société se fait un devoir de garantir notamment depuis que la Convention Internationale des droits de l’enfant a consacré la formule de « l’intérêt supérieur de l’enfant ».
Peut-on, au nom du droit des enfants, revenir sur un acquis ancien, profondément rentré dans les mœurs, ou bien l’effet cliquet joue-t-il là comme ailleurs ? Nous ne pensons ni l’un ni l’autre. De même que la légalisation du divorce, suivie de sa banalisation ont été le fruit d’une lente évolution, d’une révolution culturelle, de même, c’est une évolution culturelle qu’il faut viser pour, non pas condamner le divorce, mais redécouvrir le mariage. Le divorce n’est pas une fatalité. Il y a des solutions pour la satisfaction de tous. Les meilleures ne sont pas toujours celles auxquelles on pense. Nous n’en dirons pas plus pour aujourd’hui…
Vous êtes déjà un fidèle soutien de Famille et Liberté et nous vous en remercions. C’est pourquoi nous vous invitons à participer à ce colloque dont vous trouverez tous les détails ci-joint. Venez nombreux ; faites-nous part de vos réflexions et continuez à soutenir notre action.
Etat des lieux succinct:
En 2011, 70% des enfants vivent dans une famille traditionnelle, 18% dans une famille monoparentale et 11% dans une famille recomposée[1]
En tout, un quart des enfants en famille ne vit pas avec ses deux parents.
Parmi eux, 86 % vivent avec leur mère, contre 14 % avec leur père.
1,5 million d’enfants vivent dans une famille recomposée. Parmi eux,
Avant 4 ans, ils sont 85 % à vivre avec leurs deux parents
A partir de 15 ans ils ne sont plus que 10% à vivre avec leurs deux parents
Dans les deux cas, les 3/4 d’entre eux partagent leur quotidien avec des demi-frères et demi-soeurs
14% de ces enfants de familles recomposées vivent avec leur père.
40% des enfants n’auraient plus de lien régulier avec celui des deux parents qui n’en a pas la garde[2]
80% des enfants passant au tribunal en comparution immédiate n’ont pas de père[3]
50% des mariages finissent par un divorce
Mais 65% des remariages impliquant des enfants se terminent aussi par un divorce.[4]
53% des divorces le sont par consentement mutuel mais les recours judiciaires postérieurs à ces divorces et ayant trait à la garde des enfants explosent[5]
Scolarité et divorce
En 2002 déjà, en France, 13% des moins de 15 ans sont élevés par un seul parent (contre 9% en 1990) - la mère dans 88% des cas
2 fois plus de taux d’échec au bac, dans les familles aisées, en cas de rupture conjugale.
1 enfant sur 2, chez les ouvriers, quitte le système scolaire sans aucun diplôme, s'il est élevé par sa mère, contre 1 sur 3 si les parents sont ensemble. [6]
45% des enfants de parents unis obtiennent un diplôme d’étude supérieur, 22% des enfants de couples séparés [7]
Etude Regnerus
Ces statistiques confirment les résultats de l’étude réalisée par Mark Regnerus, professeur à l’université du Texas auprès de 3000 adultes de 18 à 39 ans, représentatifs de la population américaine, sur leur situation et leurs comportements, en fonction du type de famille dans lequel ils ont été élevés.
Si l’attention a été focalisée sur ceux dont un des parents a eu une liaison homosexuelle, l’étude compare également les résultats de ceux qui ont été élevés dans une famille recomposée ou par un parent seul, avec ceux qui ont été élevés dans un foyer stable, constitué de leur père et de leur mère.
Il ressort sans surprise de ces comparaisons que d’être issu d’une famille stable et monogamique donne un avantage, statistiquement parlant, sur ceux qui sont issus d’une famille incomplète, ou recomposée.
D’une façon moins prévisible, les enfants dont les parents se sont séparés alors qu’ils avaient atteint leur majorité, semblent plus exposés à des addictions à la drogue et plus enclin, s’ils sont homosexuels, à multiplier les liaisons que ceux relevant des deux catégories précédentes.
Nous avons publié la traduction en français de cette étude sur notre site [8]