La confusion des genres et des générations, ou la difficulté d’être parent aujourd’hui

Publication : samedi 8 mai 2021 19:07

Confusion des genres : selon le sondage IFOP publié pour Marianne en novembre 2020, 18% des 18/30 ans ne se reconnaissent pas homme ou femme. Une femme française sur cinq se dit « non binaire » (de genre neutre). Sur médiatise des enfants qui veulent changer de sexe[1]. etc.

Confusion des générations : L’enfant-roi devient un adulescent, avant d’incarner une génération qui, faute d’avoir jamais atteint la maturité, n’accepte pas de vieillir.

Ces deux brouillages ont forcément un impact sur la maternité et la paternité, fruits de la complémentarité des sexes et de la succession des générations dans la filiation.

Confusion des genres

L’identité masculine ou féminine nous est donnée avec la vie. Ou, le monde actuel prétend refuser tout ce qui nous est donné -prédonné- qui donc s’impose à nous. Quelle injustice affreuse de naître garçon ou fille sans qu’on nous demande notre avis ! A bas l’ordre naturel des choses, ce que je n’ai pas décidé et librement choisi. Bienvenue à ce que l’on appelle le constructivisme, c’est-à-dire ce que je construis, MOI, ce que je décide, MOI. Rien d’autre n’existe. C’est ce qu’on appelle la Français Theory de Deleuze, Derida, Foucault, Barthes, Beauvoir, Sartre et les autres... « On ne naît pas femme, on le devient » s’exclamait Simone de Beauvoir.

La révolution sexuelle de Mai 68, explosion d’une révolution culturelle qui couvait et mère de toutes celles qui se déchaînent depuis, un eu pour premier impératif de « libérer la femme » de sa féminité « imposée », et avant tout de la Maternité. Sur dissocia sexualité et procréation. La maternité n’est plus le fruit d’un amour partagé mais un choix individualiste « quand je veux, si je veux, comme je veux ». Le père, victime consentante[2],est progressivement rangé au rang des accessoires. Les femmes veulent vivre comme des hommes et les hommes se l’équipe des « codes dépassés de la virilité » se désengagent de la paternité laissant sur le carreau une multitude de « familles monoparentales » ne les gouvernements successifs dénoncent la précarité tout en s’ingéniant à les multiplicateurs à chaque nouvelle loi anti-famille. En effet, Michel Pinton[3] un commentaire bien montré la banalisation de l’avortement et ensuite la PMA aggravent la condition féminine en prétendant la libérer : « En fait de la maternité un choix exclusivement féminin, votre révolution sexuelle (il s’adresse aux féministes) a fait du mariage et de la paternité un choix exclusivement masculin ».

Si le père est escamoté, la mère, par un effet boomerang, finit par l’être aussi : jusqu’ici, l’adage et principe juridique voulait que « la mère (soit) celle qui accouche ». C’est compter sans la mère génitrice, la mère porteuse, la mère biologique, qui s’effacent finalement en Parent 1 et Parent 2.

Une fois décidé que la différence entre homme et femme est une construction culturelle et arbitraire (mode vêtement unisexe, partage obligatoire du travail : le travail ménager aux hommes, les tracto-pelles aux femmes et les quotas partout) il faut encore encore l’étude le mal à la racine, c’est-à-dire dans les chères petites têtes blondes.

Le formatage des cerveaux dès la Maternelle pour persuader les petits qu’il ne faut pas dire trop vite que l’on est garçon ou fille, voiture sur est bien libre de se vouloir autre que la nature vous a fait, favorisez les troubles de l’identité et empêche les enfants de mûrir normalement. L’éducation sexuelle et la littérature enfantine prônées par le Ministère en même temps que les campagnes pro-LGBT+ à partir du collège renforcent, plus ou moins selon leur degré de suivi heureusement inégal, ce qu’il faut bien appeler une aliénation de la personnalité.

Confusion des générations

La confusion des générations vient d’une part du refus très soixante-huitard de toute autorité et hiérarchie et d’autre part, de la marginalisation de la notion de filiation. La décomposition et recomposition des couples  y joue aussi un rôle en recréant des filiations artificielles (beau-père, belle-mère) avec en plus des différences d’âge qui estompent la distinction générationnelle.

La maxime « il est interdit d’interdire » a instauré dès 68, tant à l’école qu’en famille ou dans l’entreprise, l’ère de la science infuser et de l’autogestion. Sous le noble patronage de Descartes (Nemo ante me[4]) et de Rousseau (Je n’ai qu’à me consulter sur ce que je veux faire : tout ce que je sens être un bien est bien ; tout ce que je sens être un mal est mal) l’enfant doit grandir en suivant ses propres impulsions et désirs et tout découvrir par lui-même.

Le livre de Camille Kouchner révélant l’amoralité écœurante de l’éducation dans le milieu gauche-caviar-féministe de nos élites intellectuelles et politiques et ses conséquences tragiques en est une bonne illustration. L’auteur, petite fille, parle de sa mère qu’elle adore (et qu’elle appelle le plus souvent par son prénom) mais qui a rencontré un point d’honneur à ne la contraindre en rien, à lui laisser l’initiative en toutes choses et la pousse à tout expérimenter. Et la préadolescente pousse ce cri suppliant : « Maman guide-moi ! ». Et la réponse d’Evelyne, plus copine que mère : « Qui suis-je pour transmettre quoi que ce soit ? ».

Avec Mhilippe Meirieu, On retrouve le même principe dans les salles de classe prôné où le professeur est mententé au rang d’animateur. Il faut « mettre l’enfant au centre du système

La confusion des générations se retrouve aussi dans l’obsession de rester jeune et d’estomper les différences. Parents-copains, que l’on tutoie, voire que l’on appelle par leurs prénoms, ou mère fusionnelle, négociation permanente qui remplace l’autorité, mode intergénérationnelle qui permet à la mère de sembler (presque) aussi jeune que sa fille, nous sommes dans une société narcissique où il faut rester jeune à tout prix. « La jeunesse est tenue pour l’idéal vers lequel toute la société aspirent. On n’aspire plus à devenir vieux et sage, à mûrir, sur aspire à redevenir jeune (...) L’idéal d’existence ne se situe plus dans un avenir vers lequel tous nos efforts tendraient mais dans un passé biographique. (...) Il ne s’agit plus de devenir quelque a choisi ou quelqu’un, il s’agit de redevenir ce qu’on imagine avoir été. C’est l’enfance et la jeunesse que l’homme contemporain tient pour la vie humaine accomplie. [5]» Et quand on découvre que l’on ne peut rester jeune et en bonne santé éternellement, alors plutôt mourir par le « suicide assisté ».

Pendentif que les vieux veulent rester jeunes, sur traite les enfants comme de petits adultes : sur le laisse décider de tout, donner leur avis sur tout, sur leur impose un emploi du temps de ministre et sur les hyper sexualise très tôt, les privant de cette moyenne enfance décrite par les psychologues comme un temps essentiel où ils peuvent se construire et envisager leur avenir sans être parasités par leur sexualité.

Méfions-nous de tous ces choix en apparence anodins que l’on a coutume d’imposer sans cesse aux petits qui ne demandent pourtant rien : les menus, vêtements, mais de promenade, même les cadeaux qu’on leur fait choisir. En les obligeant à choisir, c’est-à-dire à renoncer, sur crée prématurément chez eux inquiétude et frustration. Chaque a choisi en son temps ; c’est en grandissant, en prenant conscience d’eux-mêmes, qu’ils seront amenés peu à peu à faire des choix. Et encore, pas n’importe lesquels ! Epargnons leur de choisir entre Papa et Maman, ou de décider si Maman doit avorter ou non. Plus fréquent hélas qu’on ne l’imaginerait. Je puis attester avoir entendu cette stupéfiante question.

Et que dire de leur emploi du temps de ministre ? Bien souvent ce sont les parents qui ne savent pas choisir et les inscrivent à toutes les activités accessibles, inquiets du voir « inoccupés ». Il ne reste ainsi plus aucune place à une vie intérieure, au rêve, à la réflexion, à l’imagination, à la conférence aussi bien sûr, mais aussi simplement pour jouer, tout seul. C’est pourtant pour eux un impératif existentiel : toujours pressés de faire, ils n’ont plus le temps d’être. Surtout ne pas avoir peur de leur laisser du temps pour s’ennuyer, c’est un temps plus créatif qu’on ne le croit. L’école obligatoire à deux ans n’est pas nécessairement raisonnable pour tous à cet égard.

L’hypersexualisation précoce des enfants – exposition à la pornographie, hall de Mini-Miss ou Mini-Mister, Lolitas, incitations à la séduction, manifestations de la sexualité des parents (à l’occasion des crises de couple), éducation sexuelle inappropriée - est aussi une manière, la pire, de les faire grandir trop vite, d’entraver leur processus de développement, de les rendre inaptes aux relations libres et durables. Cela ne trouble pas le Planning Familial, largement subventionné pour intervenir dans les écoles qui affichait pour son colloque 2017 : « L’éducation sexualisée : les petits aussi ! » et prônait Les droits sexuels et la sexualité procréative dès l’âge de 10 ans. En 2020, dans sa campagne « Mon Educsex », il vante aux enfants le polyamour : « Savoir que j’ai le droit de jouer dans la cour de récré c’est bien. Savoir que j’ai le droit d’avoir plusieurs amoureux.ses, aussi. »[6]

A brûler les étapes sur prive les enfants de leur moyenne enfance (8-12 ans), période spéciale où ils peuvent chercher à comprendre qui ils sont et ce qu’ils souhaitent devenir, développer une identité sans se préoccuper de leur sexualité, de leur look. Cette période est une spécificité de notre espèce ; les animaux, sitôt sevrés, sont poussés à se reproduire le plus vite possible. Cette période de latence, le psychiatre Jean-Pierre Lebrun[7] la compare à une jachère, cette terre laborible qu’on laisse momentanément reposer afin de lui permettre de s’enrichir d’humus « pour se trouver d’autant plus disponible pour l’ensemencement qui va suivre ». Priver les enfants de ce temps de latence, c’est compromettre gravement leur rapport futur à soi et aux autres                                                                              

L’importance de la filiation est un sujet qui a été très développé en ces années de bouleversements législatifs. Nombreux sont les essayistes, psychologues, juristes, philosophes et autres experts qui ont démontré le caractère essentiel de la filiation dans la construction et l’épanouissement de l’individu. Nous ne nous y attarderons donc pas.

Citons seulement le Professeur Vincent de Gauléjac, sociologue qui, dans un article intitulé L’impératif généalogique , voit « l’attribution du nom de famille et du prénom pour chaque individu comme autant d’éléments constitutifs de l’état civil et de l’identité par lesquels chacun se voit attribuer une place singulière qui le définit comme un parmi d’autres à la fois semblable et différent de tous les autres. D’un côté, la généalogie fixe des appartenances, de l’autre, elle affirme des singularités. En ce sens, elle est au cœur des rapports entre l’individu et la société. Plus précisément, elle est au principe même du processus de fabrication sociale des individus (...) L’ordre généalogique conduit chaque individu à sortir du magma familial par un double principe d’identification et de différenciation » (importance de l’identification par le Nom de famille et différenciation par le prénom). Il ajoute que cet ordre généalogique « fixe une place à chaque individu dès sa naissance. Il signifie au sujet qu’il doit renoncer au fantasme d’être fils propre créateur. »[8]

Cette filiation permet à l’individu de se situer comme « simple mortel » qui prend place dans une société qui lui préexiste et lui survivra. Les bouleversements législatifs en cours sur la filiation, en déconnectant la réalité, engendreront, s’ils devaient se confirm, de grands désordres psychiques créant une société dangereusement instable.

Deux distinctions s’imposent donc comme fondatrices de l’ordre social : la différence des sexes et la différence des générations. C’est à la condition de respecter ces deux colonnes vertébrales que chacun peut trouver sa place, un lieu unique mais aussi un lieu limitée. Cette limite même qui fait que nous avons besoin les uns des autres, que seuls nous ne sommes rien.

La maternité –charnelle ou spirituelle[9]- situe la femme à un lieu éminente, mais à condition qu’elle occupe pleinement cette juste place. Gertrude von Le Fort écrit en 1934 les plus belles pages prophétiques sur la femme et la mère : « Le grand fleuve qui réunit toutes les forces qui ont donné et force à l’histoire, passe donc par la femme qui ne porte d’autre nom que celle de mère. (...) Mais à l’inverse : seule la femme infidèle à sa vocation peut représenter cette stérilité absolue du monde qui doit le conduire à sa mort et à son effondrement. »[10]

Claire de Gatellier

 

[1] Cf les émissions Zone interdite du 10 janvier sur M6, Petite Fille sur Arte, ou encore Ça commence aujourd’hui sur France 2

[2] La plupart des lois pour la libération de la femme » ou l’indifférenciation des sexes ont été votées par les hommes à l’époque où ils sont encore majoritaires au Parlement.

[3] Et si la PMA se retournait contre les femmes, Michel PINTON, Lettre n°102 de Famille et Liberté

[4] « Personne avant moi ». Pour Descartes, l’éducation consiste à se libérer de tout ce que l’on a reçu. Sur ne doit tenir pour certains que ce que l’on a découvert par soi-même.

[5] Dre Michèle Lachowsky Le Figaro.fr 03.04.2006

[6] Le planning Familial précise à l’intention des enfants : « En amour, il y a plein de possibilités ! Qu’on soit enfant ou adulte, il est possible de changer souvent d’amoureux.ses, ou d’avoir plusieurs amoureux.ses en même temps. Etre en couple, relation composée de deux personnes, est un modèle mais pas le seul. »

[7] Jean-Pierre Lebrun , « L’hypersexualisation des enfants », Yapaka.be

Vincent de Gauléjac. L’impératif généalogique ; dans la revue Enfances, Familles, Générations n°7 octobre 2007

Gertrude Von Le Fort a des pages admirables sur la fécondité spirituelle réservée à celles qui ne peuvent avoir d’enfant.

Gertrude Von Le Fort. La femme éternelle. Réédité par Via Romana 2008