Procréation et natalité

Publication : lundi 21 mai 2018 14:13

Audition au CCNE de Famille et Liberté le 30 mars 2018.

Intervention de Jean-Marie Schmitz

 

Pour la première fois en Europe, en 2016, le nombre de cercueils a dépassé celui des berceaux, illustrant « l’hiver démographique » de la Vieille Europe, annoncé depuis des années par d’éminents démographes.

La France, en trois ans, a perdu plus de 50.000 naissances, « une baisse inédite en vingt ans » nous alerte l’UNAF, et son indice de fécondité n’est plus, en 2017, que de 1,88 enfants par femme, alors que le seuil que tous les démographes définissent comme permettant le renouvellement des générations est de 2,1. Le moment nous paraît donc très mal choisi pour démanteler ce qu’il reste de politique familiale, comme l’actuelle majorité parlementaire en a conçu le projet en supprimant le quotient familial, sous prétexte qu’il favoriserait les plus hauts revenus, et en modulant les allocations familiales en fonction des revenus. Il est étonnant, après les multiples travaux menés par le père de la démographie française, Alfred Sauvy, de devoir rappeler que la politique familiale n’a pas pour objet de combler les écarts entre ceux qui sont riches et ceux qui le sont moins – ce qui est l’apanage des politiques fiscale et sociale – mais d’éviter que les ménages qui ont des enfants, et assurent ainsi l’avenir du pays, voient leur niveau de vie se dégrader par rapport à ceux qui n’en ont pas. L’objectif du quotient familial est, selon l’expression d’Alfred Sauvy, « qu’à niveau de vie égal il y ait taux d’imposition égal ». Or toutes les études réalisées confirment ce que le bon sens permet d’anticiper : la capacité contributive des familles avec enfants est moins élevée, à revenu égal, que celle des ménages qui n’en ont pas. Les enfants sont une des grandes joies de la vie…mais elle a un coût ! Les familles ne mettent pas au monde des enfants pour de l’argent, mais elles peuvent renoncer à un désir d’enfant, en particulier pour des raisons économiques ; c’est ce qui explique l’écart important, aujourdhui, entre le désir d’enfants, qui est de 2,5 et l’indice de fécondité réel (1,88). La récente étude du professeur Gérard - François Dumont sur l’évolution de la natalité française, de 1975 à maintenant est sur ce plan très instructive : en analysant onze étapes successives sur cette période de plus de 40 ans, il montre la corrélation entre l’évolution de la natalité et les éléments favorables ou défavorables de la politique familiale menée. Il faut en outre ajouter que pour atteindre le seuil de 2,1 enfants par femme, il est nécessaire qu’il y ait un pourcentage notable de familles nombreuses pour compenser les femmes qui ne se marient pas ou n’ont pas d’enfant ou n’en ont qu’un. Or le rapport de la Cour des Comptes de Septembre dernier constate que les réformes menées durant la présidence de François Hollande induisent « à niveau de vie équivalent des pertes beaucoup plus élevées pour les familles nombreuses que pour les autres ».

Nous croyons donc nécessaire pour l’avenir de notre pays que soit menée une politique familiale vigoureuse, qui prenne en compte le rôle des familles nombreuses au lieu de les pénaliser, et qui s’attache à valoriser la famille. On déplore à juste titre la situation douloureuse des familles monoparentales, mais que fait-on pour valoriser le mariage et sa pérennité dans l’engagement du couple ? Quel hommage ou quelles contre-parties offre-t-on aux femmes qui décident de se consacrer à leur foyer et à leurs enfants ? Ce n’est pas en les traitant de « légumes » comme le fit l’époux d’une ancienne ministre qu’on suscitera des vocations…