Quand la "Fête des mères" se dilue dans "les gens qu'on aime"

Publication : jeudi 1 juin 2023 14:02

Voici la lettre d'un parent d'élève, Maguelone Court, adressé à son directeur d'école.

Un argumentaire à ne pas manquer

Cher Monsieur, chère équipe éducative,  
 
Première occasion pour moi de vous contacter. Nous sommes en juin, et je vous remercie sincèrement pour le travail que vous faites auprès de nos enfants ! Nous apprécions récupérer notre fille chaque jour avec le sourire, et la joie d'y retourner le matin !  Je prends le temps de vous exprimer mon incompréhension face à cette fête des gens qu’on aime qui arrive. Vous avez pris la décision de ne plus nous nommer, ni père ni mère,
en ôtant la joie commune de célébrer le beau rôle que nous avons chacun.
C’était pourtant une si belle tradition. Je me souviens du crépitement intérieur, et de l’impatience d’offrir enfin le meilleur de ce que j’avais pu préparer pour celle qui me portait chaque jour. Aujourd’hui, alors que je porte à mon tour la vie, la fatigue, la patience, la joie, les peurs, la gestion quotidienne, l’amour évidemment … je suis heureuse d’être célébrée pour mon rôle de maman, que personne ne peut remplacer. Ni la voisine d’en face, ni « le gens qu’on aime ». Les mamans sont précieuses, pourquoi s’empêcher de les célébrer ? 
 
J’imagine que vous avez voulu ne pas faire de peine aux quelques enfants qui n’ont pas, ou plus de mamans à l’école ? Je me demandais si cette annulation du titre de mère ne blessait pas plus de personnes qu’elle n’en consolait. Toutes ces mamans qui deviennent transparentes derrière l’appellation « gens qu’on aime » par exemple, payent pour combien de mamans absentes ?  
 
Oui, j’ai du mal à voir l’intérêt du changement d’appellation. Pourquoi faut-il aplanir ce que vivent les enfants ? Pourquoi gommer leurs sentiments et leurs émotions, plutôt que de les accompagner ?  (Si tu ne peux pas l’offrir à ton papa, nous allons le rendre encore plus beau pour l’offrir à ton papi).  Naïvement, je me dis qu’un enfant qui n’a pas la joie de connaitre un de ses deux parents, va être confronté plus d’une fois dans l’année à cette difficulté : mieux l’accompagner ne consisterait-il pas à identifier ses sentiments, à les reconnaitre, et à l’aider à vivre avec ? 
 
Et l’enfant qui vit avec ses deux parents n’apprend donc plus à reconnaitre l’amour particulier qui le lie à eux ?  
J’ai le sentiment que mon investissement quotidien de maman, n’est plus digne d’être nommé, ni reconnu. 
 
Lors de notre discussion vous m’avez répondu que l’école n’était pas obligée de faire un cadeau. Certes. Ce n’est pas une obligation. Mais si l’école n’apprend pas à un enfant la joie de bricoler, préparer, chuchoter, pour enfin connaitre la joie d’OFFRIR, à celui ou celle qui lui donne tant quotidiennement, qui le fera ? Le parent isolé sera choyé par qui, si ce n’est par son enfant à travers la maitresse ?   
 
Je veux seulement vous dire que je suis très peinée. Pour avoir eu l’occasion d’en parler avec des mamans du couloir des maternelles, je vous dis aussi que je suis loin d'être seule.   
 
Merci pour tout votre investissement auprès de nos enfants. Nous savons que vous faites de votre mieux. Mais ce point- là est particulièrement dur à encaisser.  
 
Je vous souhaite une bonne journée.  
 
Le « gens qu’on aime »